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Débat Macron – Le Pen : la mise à plat de notre fiscalité anarchique et tentaculaire attendra  [Analyse]

Écrit par Contribuables Associés
impôts-présidentielle © Capture d'écran France 2

Ceux qui auront attendu quelque chose du débat Le Pen – Macron en matière de fiscalité en auront été pour leurs frais. Beaucoup de promesses, beaucoup de dépenses mais peu de choses sur les recettes, c'est-à-dire les impôts. Un débat où l'on a cru entendre que les impôts ont diminué et vont encore baisser... ?

 

Sur le sacro-saint sujet du pouvoir d’achat, Marine Le Pen a défendu la baisse de la TVA et Emmanuel Macron la distribution de chèques ou la création d’un bouclier.

Marine Le Pen a en effet proposé de ramener la TVA sur l’énergie de 20 % à 5,5 % et même de la supprimer sur les produits de première nécessité comme l’alimentaire.

En face, Emmanuel Macron lui a rétorqué que cela ne servait à rien puisque la baisse de la TVA profitait indistinctement aux riches comme aux pauvres et qu’en plus la baisse de TVA n’était le plus souvent par répercutée et tombait en définitive dans la poche du commerçant ou des intermédiaires.

L’argument du candidat président est un peu curieux puisque, dans ce cas-là, pourquoi existe-t-il des taux réduits de 2,1 % pour la presse, 5,5 % pour l’alimentation ou encore 10 % sur les travaux à la maison ?

Si les taux réduits ne font pas baisser le prix final, autant tout mettre à 20 %, pour améliorer les recettes de l’Etat sans coûter plus au consommateur.

Ce serait absurde et la baisse de la TVA est donc clairement une mesure de baisse des prix, l’éventuelle aubaine pour le commerçant étant régulée dans le temps par les effets de la concurrence.

Par contre, il n’est pas certain que Marine Le Pen ait bien compris que la TVA n’était pas juste une taxe sur la consommation mais un mécanisme de « taxation-récupération » tout au long du processus de fabrication et distribution.

Autrement dit, une baisse de TVA n’est pas un simple manque à gagner mais un coût pour l’Etat qui doit continuer de rembourser la TVA que le commerçant aura acquitté en amont.

Cela dit, c’est peut-être mieux que la solution macronienne de distribution de chèques en temps de crise qui semble un peu facile et dangereuse.

Le chèque déresponsabilise et surtout l’Etat doit le payer. A un moment ou à un autre, il se transformera donc en impôt.

Enfin, les chèques et autres primes commencent à faire accumulation de rustines sur un pneu crevé ou pansements sur un corps pantelant. Cela manque un peu de long terme et de hauteur.

Sur les autres propos fiscaux des candidats, on peut évoquer l’impôt minimal de 15 % voulu par Emmanuel Macron pour les grands groupes au nom d’une harmonisation fiscale assez floue mais surtout européenne.

Sur un plan plus hexagonal, ce dernier a rappelé la suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale. Marine Le Pen a alors constaté que cette suppression s’accompagnait d’une hausse de la taxe foncière. Ce qui n’est pas faux.

Elle aurait pu ajouter que cette hausse concernait aussi la taxe d’habitation sur les résidences secondaires, voire préciser que si le paiement de la taxe foncière ne concerne que les propriétaires, son coût s’adresse à tous puisqu’il est forcément répercuté sur le locataire : directement en ce qui concerne la taxe d’enlèvement des ordures ménagères qui explose, ou indirectement par une hausse des loyers pour compenser la perte de revenus du propriétaire.

Pour sa part, Marine Le Pen a insisté sur ses promesses de rétablir la demi-part fiscale des veufs et veuves et d’offrir une part complète dès le deuxième enfant.

Mesures intéressantes mais qui ne s’attaquent pas au vrai problème que constitue un quotient familial devenu incompréhensible par sa complexité et surtout inefficace du fait d’un plafonnement punitif.

La candidate souhaite également exonérer d’impôt sur le revenu les contribuables de moins de 30 ans. Cela incitera peut-être Kylian Mbappé à rester au PSG mais pourquoi diable l’âge serait-il un critère d’exonération ?

En définitive, on a vu surgir des idées de primes diverses ou d’exonérations de charges sociales financées par l’Etat qui font qu’on ne sait plus si on parle de dépenses sociales ou fiscales, mais au bout du compte aucune volonté d’affronter notre fiscalité anarchique et tentaculaire.

Le Président semble d’ailleurs lui-même un peu perdu dans les arcanes de Bercy puisqu’il a commencé par affirmer qu’il n’avait été que ministre de l’Economie et non des Finances pour justifier qu’il n’était pas responsable des refus de prêt au Front National par les banques françaises, avant de finir par… mettre en avant son expérience d’ancien ministre de l’Economie et des Finances.

Emmanuel Macron n’a effectivement jamais été ministre des Finances mais il ne semble que partiellement s’en souvenir.

C’est sans doute cette mémoire partielle qui lui fait voir aujourd’hui des impôts en baisse pour les Français.

Publié le jeudi, 21 avril 2022