Éducation nationale : une bérézina scolaire à 60 milliards d'euros par an

Écrit par Fabrice Durtal
education-nationale-dépenses-publiques © Daniel Hoz / Shutterstock

Toujours plus de moyens pour toujours moins de résultats… La France paie le délabrement d’un système scolaire transformé en friche expérimentale depuis 40 ans.

Beullac, Savary, Jospin, Lang, Peillon, Vallaud-Belkacem, Blanquer, Pad Ndiaye et maintenant Attal...

Si on mettait au tableau les ministres qui ont chapeauté le ministère de l’Éducation nationale depuis une quarantaine d’années, on obtiendrait la plus belle galerie de zéro pointés de la Ve République.

Selon la dernière étude quinquennale PIRLS (Progress in International Reading Literacy) évaluant le niveau en lecture des élèves de 10 ans, la France figurait sous la moyenne européenne en 2021.

Concernant le niveau des connaissances scolaires des élèves de CM1 et de 4e en mathématiques et en sciences, testé tous les 4 ans par l’enquête TIMSS (Trends in International Mathematics and Science Study), le niveau des élèves français stagnait également sous la médiane européenne en 2022.

Même constat de l’enquête PISA (Program for International Student Assessment), une évaluation triennale organisée par l'OCDE : la France ne cesse d’y dégringoler.

Classée 15e en 2000, elle est aujourd’hui au 23e rang sur 79 pays testés.

Si l’émergence des écrans, le manque d’implication des parents et l’arrivée de tombereaux d’élèves d’origine étrangère expliquent une partie de ce fiasco, l’État est le premier contremaître de la fabrique des cancres.

Bien que le budget du ministère de l'Éducation et de la Jeunesse, 1er poste de dépenses devant la défense, représente 59,7 milliards d'euros en 2023, sa hausse (continue depuis 2017) ne compense pas le délabrement d’un système éducatif transformé en friche expérimentale depuis 40 ans.

But recherché par les crânes d’œuf de la rue de Grenelle : déblayer un enseignement élitiste, et bâtir une école unifiée accueillant la totalité d'une classe d'âge jusqu'à la fin de la scolarité obligatoire, même si cette massification ne permet pas de maintenir le niveau acquis par les générations précédentes.

Bérézina scolaire

Bilan ? D’après les tests effectués auprès des 750 000 participants à la Journée défense et citoyenneté 2022, plus d’un Français sur 10 rencontre des difficultés de lecture et près de la moitié d’entre-eux se trouve en situation d’illettrisme…

Pour pousser tous les élèves vers le baccalauréat quel que soit leur niveau, le législateur a fait feu de tout bois : depuis la Réforme Haby (1975), une bonne dizaine de réformettes se sont succédé, chaque ministre voulant marquer l’Histoire.

Parmi les pires épisodes de cette course à la médiocrité, on peut citer la refondation « inclusive » menée par Vincent Peillon (2013), puis la refonte du collège unique de Najat Vallaud-Belkacem (2016) redéfinissant les compétences du socle commun et le contenu des programmes pour les rendre plus lisibles, plus progressifs…

Le lycée n’a pas été épargné avec le quasi-démantèlement du bac sous l’égide de Jean-Michel Blanquer (2018) et la mise en place du système d’orientation Parcoursup qui joue les affectations universitaires sur un coup de dé.

La machine éducative est tellement grippée qu’elle ne parvient plus à recruter des profs.

A ces réformes administratives, se sont ajoutées une refonte des programmes selon des critères très idéologiques et l’irruption de méthodes pédagogiques éliminant tout critère élitiste au nom de l’égalité des chances.

Réfractaires à la notion d’échec, cette pédagogie molle a remplacé les activités intellectuelles classiques, fondées sur l’analyse et la réflexion individuelle, par des « méthodes d’étonnement » et la découverte de l’abstraction grâce à des « tâtonnements inductifs ».

En français, pour ne citer que cette discipline, le résultat de ce renouveau pédagogique a provoqué la méconnaissance des accords et à la non-application des règles grammaticales.

Résultat, confronté à la même dictée (68 mots) à 30 ans d’intervalle, les écoliers de 2023 font le double de fautes que leurs aînés, constatait récemment Pap Ndiaye, alors ministre de l’Éducation nationale.

Essor de l'enseignement privé

Conscients de la dégradation du niveau de l’enseignement public, des absences chroniques de professeurs, et de l’insécurité grandissante dans les cours de récré, beaucoup de parents ont orienté leurs enfants vers le privé.

Un refuge que la rue de Grenelle aimerait bien démanteler pour obtenir un nivellement d’ensemble.

La dernière offensive a été menée par Pap Ndiaye menaçant de couper les subventions accordées au titre de l'accord Lang-Cloupet de 1992 si le privé ne s’engageait pas à plus de « mixité sociale ».

Faillite scolaire dans le secondaire, et délabrement du supérieur (25,7 milliards d'euros de budget en 2023 pour l'Enseignement supérieur et la Recherche) où le « wokisme » fait son nid.

S’il ne fallait donner qu’un exemple de la perdition intellectuelle occasionnée par cette cancel culture, l’émergence de l’écriture inclusive décroche le pompon.

A priori, ce charabia destiné à diminuer les « inégalités de genre » dans la langue écrite afin de parvenir à un langage épicène, "asexué", aurait dû être combattu dans le supérieur comme elle l’a été dans le secondaire.

On s’attendait à ce que les 92 000 enseignants du supérieur et leurs syndicats se dressent contre ce sabir avec l’appui de leur ministre de tutelle.

Que les présidents d’universités montent au créneau pour défendre une culture qui prend ses racines dans les arts libéraux tels qu’enseignés au 13e siècle. Rien de tel ne s’est produit.

Malgré la mise en garde de l’Académie française qui y voit un poison mortel, on estime qu’environ 50% des 75 universités publiques française emploient cette novlangue à des degrés divers.

En juin dernier, les étudiants inscrits en licence de droit à l’université Lyon II ont même passé un examen dont l’intitulé était rédigé en écriture inclusive…

Ce relâchement sur la forme est symptomatique d’une université française dégradée sur le fond.

Celle qui a déserté les plus hautes marches du podium du classement de Shanghai 2022, une compétition où les universités asiatiques et anglo-saxonnes se taillent la part du lion.

Mû par la pensée unique, l’enseignement supérieur français se plie à un conformisme aveugle et à des exigences idéologiques ne correspondant pas aux facteurs de réussite de ses étudiants.

Enseignement : le syndrome du "Pas de vagues"

Ce caractère moutonnier est accentué par une administration pléthorique (86 000 agents pour le seul enseignement supérieur en 2021) plus soucieuse de suivre le fil de l’eau que de remonter le courant et par la logique interne de l’Éducation nationale.

Contrairement aux autres corps d’inspection, chargés de révéler les dysfonctionnements, celui rattaché à la machine éducative cherche à les camoufler.

Pour progresser dans la grille salariale, proviseurs et recteurs doivent démontrer que tout tourne rond dans les établissements qu’ils dirigent.

Le même principe s’applique dans le supérieur, où les ministres font le dos rond pour éviter que le mammouth ne les piétine.

Wokisme, grèves, saccages, syndicalisme radical : les facs privées et les écoles de commerce permettent aux étudiants de s’extirper de ce ghetto éducatif.

On recense environ 180 universités privées en France en 2023. Celles garantissant la qualité académique de leurs diplômes drainent de plus en plus d’étudiants.

Environ 20% de l’effectif total, selon les chiffres les plus récents.

Ce succès est tel qu’en février dernier les présidents d’universités ont demandé à l’état des mesures de bridage, notamment un « moratoire » sur la reconnaissance des diplômes et l’adoption d’un « code de déontologie ».

Les meilleurs établissements supérieurs sont pénalisés par des frais de scolarité plus élevés que dans le public, ce qui empêche certains étudiants en quête d’une formation sélective d’y accéder.

Le chèque-éducation

Ce problème de financement pourrait être résolu si l’État adoptait le système du chèque éducation.

Promu par l’économiste américain libéral Milton Friedman et en vigueur dans de nombreux pays, ce dispositif reviendrait à doter chaque famille retirant son enfant du public d’un chèque annuel équivalent à ce qu’aurait coûté son éducation.

La famille serait alors libre de dépenser ce chèque dans n’importe quelle école agréée par l’État.

Article extrait du Tous contribuables n°28 " Éducation nationale : les fossoyeurs "

une tous contribuables 28 education nationale

Abonnement d'un an à Tous contribuables : 19 € pour 4 numéros

Publié le vendredi, 01 septembre 2023

12 Commentaires

  • Lien vers le commentaire Marc Daubercies samedi, 09 septembre 2023 Posté par Marc Daubercies

    Bonjour.
    Il est plus que temps de prendre les avis de professeurs et instituteurs sur le terrain en considération ! Non ?
    Plutôt qu'une personne débarquant de nulle part et qui impose des idées sorties de son chapeau.
    Respectueusement. Marc Daubercies de Villeneuve d'Ascq.

    Rapporter
  • Lien vers le commentaire berrelguillaume lundi, 04 septembre 2023 Posté par berrelguillaume

    "plus d’un Français sur 10 rencontre des difficultés de lecture et près de la moitié d’entre-eux se trouve en situation d’illettrisme"…
    Tout est dit !

    Rapporter

Laissez un commentaire

Assurez-vous d'entrer toutes les informations requises, indiquées par un astérisque (*). Le code HTML n'est pas autorisé.

Votre adresse email ne sera pas affichée sur notre site Internet.