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Face à la crise de l’hôpital public : la débureaucratisation

Écrit par Aliénor Barrière
hopital DarkoStojanovic - Pixabay

Notre système de santé est le meilleur du monde aux dires de certains. Mais si vous voulez être pris en charge au CHU d’une grande ville comme Toulouse, ce ne peut être seulement que pour une urgence vitale. Les grèves des personnels soignants se multiplient pour réclamer une hausse des salaires et des effectifs, mais les solutions étatiques ne sont pas à la hauteur.

 

Cette année, le Ségur de la Santé a été l’occasion de débloquer 12 milliards d’euros ; pourtant, un infirmier sur deux est en quasi-burn-out.

Le fait est que la politique du chèque n’est pas une solution, seule des réformes profondes et courageuses peuvent sortir la tête de l’eau de notre système de santé.

Face à la crise que connaît l’hôpital, le président du groupe LR au Sénat Bruno Retailleau a détaillé les mesures indispensables, la plupart appelées depuis des années par Contribuables Associés.

Hôpital public : sauvetage rime avec réforme

En premier lieu, la débureaucratisation :

« En France, 34% du personnel hospitalier est administratif. En Allemagne c’est 25%. La différence entre les deux, c’est plus de 125 000 postes qu’on pourrait mettre au chevet des malades. Donc il faut arrêter les réunionites ».

Il propose également de « remédicaliser la gouvernance de l’hôpital », c’est-à-dire de laisser les médecins exercer les fonctions de direction de l’hôpital, pratique d’ailleurs courantes dans les autres pays européens.

Cette mesure permettrait de sortir encore davantage l’administration de l’hôpital et de mettre à la manœuvre des gens qui savent vraiment de quoi ils parlent.

Redonner un coup de boost à l’hôpital passe aussi par une revalorisation des horaires difficiles, et plus particulièrement le travail de nuit et les dimanches.

Actuellement, une infirmière gagne 13 euros brut de plus par heure lorsqu’elle travaille la nuit, et 50 euros supplémentaires lorsqu’elle travaille le dimanche.

La dernière proposition de Bruno Retailleau concerne la flexibilité : afin de pallier au manque de personnel en été, il faudrait autoriser les futures aides-soignantes qui terminent leur cursus scolaires en juin ou juillet à faire des remplacement l’été, avant leur remise de diplôme officielle qui a lieu en septembre.

Face à la crise aux urgences, et au lendemain des appels à manifester, la ministre de la Santé Brigitte Bourguignon a annoncé des mesures d’urgence pour soulager les hôpitaux cet été, même s’il sera « difficile ».

Elle a ainsi repris la proposition du sénateur de permettre aux élèves infirmiers et aides-soignants d’exercer l’été précédant leur remise de diplôme, ainsi que le doublement de la rémunération du temps de travail additionnel des médecins pour l’ensemble de la période estivale.

Les heures supplémentaires du personnel non-médical seront également payées double.

Alors que déjà 120 services d’urgences ont réduit leur activité ou s’y préparent, les jeunes ne seront pas les seuls sur le pont : les soignants retraités qui le souhaitent pourront également travailler cet été et bénéficieront de « facilités de cumul avec leur pension de retraite ».

Et pour piloter la coordination entre hôpitaux publics, cliniques et professionnels libéraux, la ministre a mis au premier rang… les agences régionales de santé !

Les mêmes qui sont depuis deux ans les « symboles de la gestion jugée erratique de la crise sanitaire », non seulement à cause de leur empêtrement dans la routine bureaucratique, mais aussi « parce qu’elles occupent une position structurellement intenable entre un Etat central entré en mode « consolidation » d’un côté, et ce qu’il est convenu de désigner, de façon floue, « les territoires » et leurs acteurs, élus locaux en tête, de l’autre. Elles ne peuvent dès lors que jouer le rôle de boucs émissaires des échecs des politiques publiques de santé », ainsi que l’explique le chercheur Frédéric Pierru.

Une réponse gouvernementale insuffisante

Pour Thierry Amouroux, porte-parole nationale du syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), « les moyens annoncés ne suffisent pas. Il faut se donner les moyens, changer le logiciel : revaloriser les salaires certes, mais aussi revoir les ratios de patients par infirmières pour redonner envie à ceux qui ont arrêté de revenir à l’hôpital. Il y a 60 000 postes d’infirmiers vacants aujourd’hui. Le bateau coule et madame Bourguignon nous fournit un verre pour écoper ».

Début juillet, la « mission flash » sur les services d’urgences commanditée par le gouvernement devrait rendre ses conclusions pour faire face à la crise, espérons qu’une véritable réforme de l’hôpital soit au programme.

Aliénor Barrière

Publié le mercredi, 15 juin 2022