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 [Tribune] France : vers des votations en cascade ?

Écrit par Contribuables Associés
votation-france © Maria Vonotna / Shutterstock

Avec sa « consultation citoyenne » sur l’interdiction des trottinettes, interdiction qu’elle dit souhaiter, Anne Hidalgo a ouvert la boîte de Pandore.

par François Garçon, membre de l'assemblée générale de Contribuables Associés, essayiste,  auteur de «France, démocratie défaillante. Il est temps de s’inspirer de la Suisse» (Éditions L'Artilleur), prix ALEPS du livre libéral 2022. Francois Garcon

 

Il a fallu que cette élue, responsable d’un saccage méthodique de la capitale, ose l’impensable, c'est-à-dire demander aux Parisiens leur avis, pour que cette modalité de démocratie participative s’impose comme incontournable aux autres élus.

Attendons-nous maintenant à des surenchères tous azimuts. De fait, elles n’ont guère tardé : « Je propose des votations à Paris », vient ainsi d’annoncer Sylvain Maillard, nouveau président de Renaissance Paris, député de la première circonscription de la capitale (1er, 2e, 8e et 9e arrondissements).

L’intéressé, qui n’est pas un novice, développe son idée : « Je propose l’instauration d’un système de votations différent de celui d’Anne Hildago – comme cela existe en Suisse – qui permettrait aux Parisiens de trancher des sujets impactants » ¹ 

La référence à la Suisse est d’autant moins sotte que depuis 1848, les Suisses votent tous les trois mois, sur des « objets » allant de la suppression de l’armée, à celui du statut des fonctionnaires, de l’allongement d’une ligne de tramway, à l’enterrement d’une poubelle communale.

Au total, ce sont des milliers de questions qui ont ainsi été tranchées directement, par le peuple, au niveau communal, cantonal et fédéral. Avec le succès que l’on sait : finances publiques sous contrôle, endettement public minimal, adhésion de la population aux institutions, sens du compromis, prospérité économique, etc.

Qui n’applaudirait donc pas l’annonce du député Sylvain Maillard !

La suite de son propos est cependant déroutante : les sujets « impactants », explique l’élu parisien, seraient « validés par une commission spéciale du Conseil de Paris ».

A ce stade, le député s’est déjà fortement écarté du modèle suisse. Là où, en Suisse, c’est le peuple qui, deux fois sur trois, est à l’origine des votations, le président de Renaissance Paris évoque lui une « commission spéciale », dont on ignore la composition.

Et c’est cette « commission spéciale » qui, « une fois par an (…) pourrait soumettre aux habitants une à quatre questions transpartisanes ».

La « commission spéciale » procède d’une vision bureaucratique de la politique. Il va de soi, en effet, que la « commission spéciale » sait de quoi il retourne ; la composent des professionnels de la politique, des spécialistes de la gestion publique. Clairement, tout la distingue du peuple parisien, privé de tant de gens compétents.

En outre, pourquoi se limiter à une votation annuelle, comme l’annonce Sylvain Maillard, et plafonner les questions à quatre ?

Si Sylvain Maillard se réfère au système politique suisse, il n'a visiblement pas compris ce qui en assure le succès. Le ressort du modèle de votation helvétique, c’est la régularité des scrutins, qui ainsi les banalise.

Un seul scrutin par année assorti d’une ou deux questions, c’est la promesse que les Parisiens ne répondront pas à la question posée mais, profitant de ce moment où l’occasion leur est donnée de s’exprimer, ils clameront leur détestation des élus, de leur politique, etc.

Rien de la logique du plébiscite ne nous est inconnu : le non ! en est quasiment la règle.

Nonobstant une référence élogieuse à la Suisse, le député de Paris a pourtant forgé un objet politique non identifié.

Un objet hybride qui semble faire une large place au référendum obligatoire (où les autorités élues demandent aux citoyens de valider une décision votée par une assemblée représentative), mais qui se garde de reprendre ce qui fait la force du système suisse, à savoir l’autre versant de sa démocratie participative et que résument le référendum abrogatif et l’initiative populaire.

Le premier permet au peuple de s’élever, de sa propre initiative et sans passer par une « commission spéciale », contre une loi ou une décision votée par une assemblée représentative ; la seconde permet au peuple de proposer une loi, délibérément négligée par une assemblée élue.

Ce que le président de Renaissance Paris a à l’esprit relève donc de la démarche plébiscitaire. Groupés dans une «commission spéciale du Conseil de Paris», des experts (?) s’accorderaient sur des thèmes « impactants », puis demanderaient aux Parisiens leur avis.

Tout ça sent la tambouille électorale cuisinée par des hommes politiques d’un autre siècle, incapables de considérer les citoyens autrement que comme des bonhommes Lego, sans cervelle et que l’on distrairait une fois par an avec des hochets.

Cette roublardise que nous sert le nouveau président de Renaissance Paris ne vaut finalement guère mieux que la manoeuvre démagogique d’Anne Hidalgo.

Les Parisiens méritent mieux que ces bateleurs, piètres bricoleurs.

François Garçon

1. Sylvain Maillard, « Je propose des votations à Paris », Le Journal du dimanche, 5 février 2023.

Publié le lundi, 06 février 2023

1 Commentaire

  • Lien vers le commentaire Brassecasse vendredi, 10 février 2023 Posté par Brassecasse

    La proposition de Mr Sylvain Millard est de faire croire aux parisiens qu'ils sont acteurs mais en fait ils proposent mais d'autres disposent...
    Et le tour est joué.

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