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La complémentaire santé obligatoire, un nouvel impôt qui ne dit pas son nom

Écrit par Contribuables Associés

Depuis 2016, les employeurs seront tenus par la loi de fournir une complémentaire santé à leurs salariés. Une nouvelle rustine sur un système de santé structurellement inflationniste et déficitaire. Une rustine qui, comme toutes les précédentes, sera insuffisante et retardera le nécessaire changement de paradigme en matière de financement de la santé.

 

Au commencement était la Sécu. Bien sûr, c’était il y a 70 ans à peine, mais à en croire Michèle Delaunay, c’est alors que l’Histoire a commencé. La Sécurité sociale était censée garantir à tous une couverture universelle des soins. On parlait même de « gratuité », même si, évidemment, cette « gratuité » coûtait cher : progressivement, on est arrivé à plus de la moitié du salaire en cotisations salariales et charges patronales, pour financer le système de santé ainsi que les retraites, l’assurance-chômage, la politique familiale, etc.

On s’apprêtait alors à vivre une « tragédie des biens communs » : tout le monde finançant l’assurance-maladie, et chacun pensant que celle-ci était « gratuite », la tentation était grande de surconsommer soins et médicaments, au plus grand bonheur des vrais-faux fonctionnaires que sont les médecins et les pharmaciens. Et au plus grand bénéfice de l’État thérapeutique qui faisait de chaque assujetti social un malade en sursis, qu’il fallait soigner coûte que coûte quitte à le transformer en hypocondriaque.

Un tel système ne pouvait manquer d’être inflationniste et, malgré l’augmentation continue des prélèvements « sociaux », déficitaire.  Apparut alors un trou. Le fameux « trou de la Sécu ». Quand un trou se forme, sur la voirie par exemple, un ingénieur se pose la question de savoir pourquoi il s’est formé. Et une fois la réponse trouvée, d’agir à la racine du problème. Pour la Sécu, cela aurait impliqué une réforme faisant comprendre à tous le coût sur les bulletins de salaire du système de santé, et aussi celui des soins et médicaments, en ne pratiquant pas le tiers-payant déresponsabilisant, mais en laissant les assurés « sociaux » payer leurs soins avant de se les faire rembourser.

Ce n’est pas la stratégie qui fut choisie par le gouvernement. Plutôt que de résoudre le problème à la source, il décida de combler le trou au moyen d’une rustine, la Contribution sociale généralisée, plus connue sous l’acronyme CSG. De 1,1 % du salaire brut à sa création en 1990, elle est passée à 2,4 % en 1993, 3,4 % en 1997 puis 7,5 % en 1998. Une augmentation de 581 % en huit ans ! Et pour cause : le trou ne cessait de s’élargir. En 1996, une autre rustine, un peu moins connue, était apposée au trou, la Contribution pour le remboursement de la dette sociale, ou CRDS, s’élevant à 0,5 % du salaire brut. En somme, 8 % du salaire brut sont consacrés à tenter d’éviter que le déficit, et donc la dette de la Sécu, s’aggravent encore.

Et cela a-t-il fonctionné ? Non, les déficits ont continué à prospérer, portant en 2013 la dette de la Sécu à plus de 130 milliards d’euros.

L’inefficacité des rustines a conduit le gouvernement à décider le déremboursement d’un nombre croissant de soins et médicaments, pour le plus grand bonheur d’un autre secteur de vrais-faux fonctionnaires, les complémentaires santé, plus connues sous le nom de mutuelles. Celles-ci, au moyen d’un coût supplémentaire pour les salariés et leurs employeurs, ont pris le relais de la Sécu dans de plus en plus de remboursements. À tel point qu’il est devenu problématique pour les 4 millions de salariés non-couverts par une mutuelle de continuer à se soigner.

La nouvelle trouvaille du gouvernement est d’obliger les employeurs à fournir une complémentaire santé à leurs salariés, à partir de 2016. Quand l’État oblige un acteur économique à payer, cela s’appelle un impôt. Et c’est en effet bien d’un impôt qu’il s’agit ici, puisqu’il est la conséquence du caractère structurellement déficitaire de la Sécurité sociale.

On pourrait se dire que « cette fois-ci, c’est la bonne », mais les expériences passées laissent penser que le trou de la Sécu va continuer à s’élargir, que les prélèvements « sociaux » vont continuer d’augmenter, tandis que les prestations, elles, se réduiront comme peau de chagrin. Et donc que le coût des complémentaires santé continuera lui aussi de monter. La question est : jusqu’à quand ? Jusqu’à quand les gouvernements successifs, toutes tendances confondues, continueront-ils de tenter de renflouer le Titanic ? Quand les mesures alternatives seront-elles mises en œuvre ?

S’il est impossible aujourd’hui de répondre à cette question avec précision, on sait en tout cas que cela ne se produira que quand tous les Français, gouvernés comme gouvernants, seront conscients du coût du système de santé, et donc de la nécessité de revenir à la sobriété en matière de consommation de soins et médicaments. C’est, entre autres missions, la tâche que s’est fixée Contribuables Associés. Merci de nous aider à y parvenir en nous soutenant. Ça se passe en cliquant ici.

Publié le vendredi, 05 décembre 2014